jeudi 15 décembre 2011

CULTURE / LITTERATURE / GAMALEYA

GAMALEYA

Nom et prénom : Gamaleya, Boris
Naissance : 1930, à Saint-Louis, à la Réunion
Métier : enseignant

Boris Gamaleya, né d’un père ukrainien installé dans l’île mais très tôt décédé, et d’une mère réunionnaise, passe sa petite enfance aux Makes. Après le remariage de sa mère, il est élevé par son grand-oncle maternel. La vie rurale est le premier temps d’une expérience poétique du monde, prédisposition renforcée plus tard par les lectures de poètes.la formation du jeune étudiant en Provence est riche affectivement et politiquement. Il rencontre une compatriote qui deviendra sa femme, Clélie Gamaleya, et s’inscrit au parti communiste. De retour dans l’île, il enseigne. Il devient membre du Comité directeur du parti communiste réunionnais en 1959. En 1960, il est condamné à l’exil en France par l’application de l’ordonnance d’octobre. Le poète trouve une forme de résistance aux souffrances de ce long éloignement de douze ans dans l’étude de russe et les recherches sur la poésie ainsi que sur le créole. Vali pour une reine morte, poèmes de l’exil paraît en 1973, dès son retour dans l’île. Sa quête se poursuit dans un travail sur la culture populaire à travers les contes et se prolonge dans son œuvre. Ses positions critiques l’ont éloigné du Parti communiste dans l’année 1980. Il se consacre depuis à l’écriture. Ce poète majeur publie à intervalles réguliers des œuvres toujours fortes et singulières qui témoignent d’une constante évolution.

1973 Vali pour une reine morte
Dans ce long poème dramatique, épique et lyrique ; l’île devient l’enjeu de l’affrontement opposant les esclaves marrons Cimendef et sa femme Rahariane au chasseur d’esclaves Mussard. A la fin du recueil, la parole du poète relaie le chant d’amour que Cimendef adressait à sa compagne, représentation allégorique de l’île.

Ile
Aube de jade
Vertige des aiguades exorcisées
île
5 sonore jarre de haute légende
île
sein bleu de rahariane et neige des dodos
ô mon appolonie mon cygne ma colombe
île
sang de la main noire insurgée
giclant
vers la pulpe du mombolo
avant l’aube
rassembleuse d’oiseaux et de tortues pleureuses
au sable où se défait mon corps de sphaigne bleue
de rémora lassé d’errances sans histoire
pleurez ô filaos l’amour des astéries
saluez ô conques la voile pérégrine
avant l’aube
tu me foudroies
les loudes d’une nuit sans lune
ont brisé leurs scolopentes
fouetté la meute des tanrecs
brouillé la feuille des caféiers
île
bibacier au jusant de la brume
dinarobine sur l’orbite des paillanques
sirènes empalées
au phallos du corail
île
je tombe
sous ton regard d’oiseau de la vierge
je te salue ma reine
à la ronde pleurant la mort des princes noirs
et la mer dur leur stèle enflant ses fourmilières
je te salue
à tes pieds nus ambes mes mains jamais décloses
telle
à toutes les âges du columbaire
telle
à toutes pages de l’obituaire
telle toujours
au deuil de hibiscus

île
harpège de haubans sur les lagons brisés
unité reconquise au seuil des aïdorés

île
safaris et tamtams solstices de mes dieux
intègre polypier sous la croisée des vents
île
beau matarum feulant grand pavois cimarron
et race vagissante au pagne des marées


Boris Gamaleya, Vali pour une reine morte(extrait)
Imprimerie REI (Saint-Denis), 1973.


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